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UN COIN DE POESIES
POESIES CORSES
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Quand j'étais enfant, à Ortia, au
dessus de l'épicerie du village, il y avait un bar.
C'était plutôt un "lieu de vie" où
se retrouvaient régulièrement les habitants de la commune.
On y parlait des vendanges à la
plaine, de la prochaine récolte de châtaignes, de la "tombera", de toutes
ces choses qui créent l'évènement et qui font la vie du village.
Devant d'interminables parties de
scopa
au milieu des volutes de fumée, le temps suspendait son vol.
Quand le ton montait, quand les esprits s'enflammaient, je devinais que le sujet
de la politique venait d'être abordé.
Chacun s'évertuait à compter avec un esprit de logique implacable, qui allait
voter pour qui aux prochaines élections et quand le nombre de voix pour chacun
des clans était enfin fixé, une chanson satirique était improvisée:
"In casa di u sgiò
Guelfucci,
So biscotti e bicchierini ;
In casa di u sgiò Mignucci
So cacati sumerini."
Mais il y avait aussi, quandu
i cori erannu allegri, ces moments de poésie dont seule "l'anima
Corsa" a le secret. Je veux parler de ce chant à capella, sorte de joute
verbale poétique que l'on nomme "CHJAMA E RISPONDI".
La main collée à l'oreille, pour
vérifier le timbre de la voix (comme pour la "paghjella"), les hommes debout au
comptoir, devant un verre de pastis, chantaient tour à tour d'une voix
puissante, les paroles d'une "histoire" totalement improvisée.
Mon oncle me lançait toujours à la
fin :
" Qui nè pensi o zitellò ?! "
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