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IL ETAIT UNE FOIS EN CASTAGNICCIA
SAINT JEAN-BAPTISTE
JEAN-BAPTISTE LE PRECURSEUR
(24 juin-29 août)
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Le hameau de Bonicardu est placé sous
la protection de Saint Jean-Baptiste. L'église, construite au centre du
village, probablement au XIVème siècle, possède des fresques admirables que l'on attribue à
l'artiste peintre décorateur Italien GHERARDI Gherardo qui
réalisa plusieurs oeuvres dans de nombreuses églises de la Castagniccia
entre 1857 et la fin du 19ème siècle. Au dessus du vitrail on
peut lire la date de MDCCCLXXVII (1877).
On constate aujourd'hui que ces
peintures sont en partie détruites par de grossiers et outrageants
"rafistolages" au ciment.
Le village de Bonicardo y a été construit tout
autour. Sur la place où prônait encore majestueusement le
grand tilleul, les soirs d'été, ses habitants se réunissaient.
A l'occasion de la Saint Jean Baptiste,
une grande procession avait lieu l'après midi. La statue du
saint, portée tour à tour par tous les hommes valides, sortait
de l'église et faisait le tour du village. Une fois la
procession terminée, on posait la statue sur la table près de
l'autel, on venait l'embrasser et se signer et tout le monde
déposait en offrande de l'argent selon ses moyens.
Je me souviens qu'ils
étaient nombreux à vouloir refaire le monde; mais ce monde là était
plein de sagesse et était pour nous les jeunes une leçon de morale
perpétuelle que pour rien au monde nous n'aurions voulu manquer...
Et puis, signe annonciateur
des temps modernes et du changement, "a panculella ", comme ils
l'appelaient, a été remplacée par un banc de pierre qui a fait s'envoler
la magie. Lentement, inexorablement , certains ne sont plus venus
s'asseoir. Leur place est restée désespérément vide puis le charme de
ces longues veillées a cessé d'opérer, remplacé par le silence qui
envahit la place aujourd'hui déserte. Parfois, je monte m'asseoir sur le
banc de pierre et, avec mes souvenirs, je fais revivre ces moments
magiques et inoubliables de mon enfance. Dans nos villages perdus de
Castagnaccia où le plus petit hameau avait son église, chaque fête
religieuse était un jour de liesse qui attirait beaucoup de monde des
villages voisins et qui permettait aux habitants de se rencontrer, de se
retrouver.
A
cette occasion la porte du "Salottu", une pièce dans laquelle
nous ne pénétrions qu'en de rares occasions, était ouverte. Le
jour de la cérémonie, la maison était parfaitement rangée, les femmes
sortaient la belle nappe blanche de leur trousseau brodée à leurs
initiales pour recevoir les invités. On préparait des oreillettes et des
beignets, on moulais du café frais dont je
respire encore la bonne odeur quand je ferme les yeux, on posait sur la
table le vin et l'acquavità que l'on faisait soi-même puis on
s'habillait pour assister à la messe. Pendant l'office religieux, tandis
que les femmes "d'une certaine caste" avaient pris place au premier rang
sur le prie-dieu gravé à leurs initiales , la plupart des hommes
restaient dehors à discuter. Cette "coutume" a toujours été pour moi une
interrogation quand j'étais enfant.
Tard dans l'après midi, le village se
vidait lentement, nos visiteurs s'en repartaient à pied comme ils
étaient venus, après s'être promis de se revoir à la prochaine fête du
canton. Moi, je ne manquais pas de demander déjà à Mammona : "Quandù e San Roccu, Chi ghjornu casca
San-Vitu ?"
Les églises servaient aussi de lieu
de Sépulture.
Pauvres ou riches, les morts
reposaient dans la fosse commune, l'arca dans laquelle on
jetait de la chaux. L'église Sainte Marie à Sorbellu
témoignait encore de ces pratiques jusqu'à ce qu'elles soient interdites
après 1789. Devant la porte une lourde dalle en
pierre sur laquelle sont gravés ces mots: " QUA TI VOGLIO "
fermait l'entrée de l'arche située sous la chapelle.
Plus tard, la coutume fut prise
d'ensevelir les morts dans leur propriété et sous leurs châtaigniers. De l'église de Santa Maria qui
s'est effondrée sous le poids de la neige en 1979, Bonicardu a
récupéré la grosse cloche et la dalle de pierre, vestiges du temps passé
qui nous rappellent cette expression: "Puzza cumè l'arcà".
Qui était Saint Jean-Baptiste ?
Jean-Baptiste le Précurseur est né
à Aïn-Karim en Judée, en 8 av.JC. Sa naissance est fêtée en occident le 24
juin. Il est le fils de Zacharie et de Sainte Elisabeth. Son nom est issu de l'hébreu "Jo",
abréviation de "Yaveh" (Dieu) et de "hanan" (miséricordieux).
Saint Jean est le quatrième
évangéliste. Il est le cousin de Jésus et le frère cadet de Saint
Jacques le Majeur, et est surnommé avec son frère "Fils du tonnerre".
Auteur de l'Apocalypse, qu'il écrivit dans l'île de Patmos, il est
pourtant l'apôtre qui a le plus insisté sur l'amour comme rédemption des
fautes. Il est également le seul disciple à avoir suivi le Christ dans
son agonie au pied de la croix. Après avoir baptisé Jésus et l'avoir
désigné comme "l'Agneau de Dieu", saint Jean-Baptiste lui confiera ses
disciples.
Les tableaux et les statues
représentent Jean-Baptiste vêtu d'une peau de mouton, tenant une croix,
un agneau à ses pieds, levant les yeux pour regarder la colombe de
l'Esprit-Saint qui descendit du ciel lorsqu'il baptisa Jésus.
Sur un rouleau de papier on peut lire
ces mots : "Ecce Agnus Dei".
Le Jean-Baptiste de notre église,
lui, a mis sa tenue d'apparat pour venir à Bonicardu !.
Avant d'être associée à la Saint
Jean-Baptiste, cette fête était déjà célébrée par les peuples païens. On
allumait un immense feu de joie symbolisant la lumière du soleil.
Comme beaucoup de traditions païennes, le rite du feu de joie du jour le
plus long de l'année a été christianisé au Moyen-Âge.
Très naturellement ces festivités ont été associées à Saint
Jean-Baptiste qui est né un 24 juin.
Les feux de joie ont donc généralement lieu le soir du 23 juin. Tous les habitants, jeunes
et vieux, apportent les derniers préparatifs au bûcher qui illuminera ce
soir tout le village.
Autrefois,
la veille de la fête paroissiale, à la tombée de
la nuit, quand sonnait l'Angélus, tout le monde illuminait ses fenêtres.
On plaçait sur chaque fenêtre une
lampe à huile. Ceux qui n'avaient pas de bougie prenaient des oignons,
les ouvraient en deux, enlevaient l'intérieur et y installaient
une veilleuse. D'autres y mettaient une mèche comme pour les
lumerule (lampe à huile). Après le
repas du soir, la cloche de l'église sonnait à toute volée pour rassembler
i paisani qui faisaient cercle autour du faloru que le curé venait de bénir.
La tradition voulait que les jeunes gens sautent par-dessus le feu, et que
ceux qui voulaient se marier dans l'année sautent par-dessus 9 feux
différents. Autrefois, après avoir sauté par dessus le feu, des
couples de jeunes gens et de jeunes filles se formaient et chacun
récitait un serment d'amitié en jetant un cheveu dans le brasier.
La tradition voulait également que dans la nuit du 23 au 24 juin on
récolte des plantes médicinales (erba di San ghjuvanni:
millepertuis, saponaire, chèvrefeuille, immortelle). Un dicton dit d'ailleurs que "les
herbes de Saint Jean gardent leurs vertus tout l'an".
Le lendemain matin, jour de
la Saint Jean, chaque famille revient chercher un tison sur le tas de
cendres encore fumant pour l'emporter chez elle. Conservé jusqu'à
l'année suivante, ce tison aux vertus bienfaitrices protégera la maison
et ses habitants.
Saint-Jean connut une
fin tragique. Ayant critiqué les moeurs du roi Hérode qui avait épousé
Hérodiade, la femme de son demi frère, Saint Jean fut emprisonné, puis décapité
en 31. On dit qu'Hérodiade, pour obtenir la tête de Saint Jean, fit danser
sa fille Salomé devant Hérode. Subjugué par la danse de la jeune fille,
Hérode lui promit de lui accorder tout ce qu'elle voudrait. Salomé demanda
pour prix de sa danse qu'on lui apporte la tête de Saint Jean sur un plateau
d'argent.
Saint Jean-Baptiste est le patron des
couteliers, des oiseliers, des peaussiers, des rémouleurs, des
tonneliers. Il est invoqué contre la grêle et
l'épilepsie.
Dictons : "S'il pleut à la Saint
Jean, guère de vin ni de pain".
"Après la Saint Jean, si le coucou
chante, l'année sera rude et méchante".
Au fait, comment s'appelle
l'oiseau de la Saint Jean ( l'acellu di San Ghjuva') ? : le
gobe-mouche.
Saint Jean-Baptiste est fêté le
24 juin (nativité, dite fête de Saint-Jean d'été) et le 29 août
(décollation).
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